- 1535 : une bible, traduite en français pour la première
fois à partir des originaux hébreux et grec en français,
paraît à Serrières.
- 1840 : Charles Prince donne un cours sur les Choéphores
d’Eschyle et sur la République de Platon dans le cadre
de la Première Académie de Neuchâtel
- 2005 : la chaire de grec ancien de l’Université
de Neuchâtel est supprimée
Thierry Béguin avait tort quand il déclarait, le
jour où le Conseil d’Etat a transmis le plan d’intentions
de l'Université de Neuchâtel au Grand Conseil, que
ce n’était pas parce que l’on supprimait une chaire
de grec que l’on allait pour autant sombrer dans la barbarie.
Il avait tort, car nous sommes déjà dans la barbarie.
Le déroulement de l’ensemble de la procédure
visant à l’acceptation du plan d’intentions en
est le témoin. On peut en voir deux signes au moins.
Un déficit démocratique s’est manifesté
de manière inquiétante. Tous ceux qui ont voulu s’exprimer
sur la suppression de ces enseignements, qu’il s’agisse
des institutions internes à l’Université, des
personnes qui ont signé les diverses pétitions, des
étudiants qui sont descendus dans la rue, n’ont pas
été entendus. Le plan d’intentions a été
conduit comme un rouleau compresseur, écrasant au passage
toute possibilité de dialogue. Comme l’a rappelé
le professeur Denis Knoepfler dans sa lettre ouverte (voir sous
Documentation), les Grecs
avaient déjà perçu les dangers qui guettaient
la démocratie. Les bourdons ambitieux de Platon sont-ils
déjà à l’œuvre ?
De plus, le plan d’intentions a été adopté
parce qu’aux yeux de beaucoup de décideurs, il paraissait
raisonnable. Là aussi, les Grecs nous ont mis en garde contre
une dictature de la raison. La raison n’est qu’un outil
de la pensée parmi d’autres. Mais un excès de
raison conduit à la déraison. Afin de mettre en garde
leurs concitoyens, les Tragiques grecs ont présenté
sur la scène du théâtre d’Athènes
la figure du roi de Thèbes, Penthée ou Créon,
qui met la raison, sa raison, au-dessus du tout, conduisant finalement
sa cité dans le chaos. Au roi de Thèbes, ils ont opposé
la figure de Dionysos, le désordre bienvenu qui permet à
l’ordre de se régénérer. La science actuelle
a aussi besoin de manifestations bachiques, tant le danger de la
voir progresser sans garde-fou est grand. Qu’on se souvienne
des paroles de Rabelais : « Science sans conscience n’est
que ruine de l’âme ». Notre système d’éducation
ne peut pas être bâti uniquement avec une conception
utilitariste. Il doit veiller à entretenir ici et là
des niches de pensée critique, des connaissances qui, de
prime abord, n’ont pas une application directe, mais qui, à
long terme, portent leurs fruits. Le grec ancien fait partie de
ces connaissances qui interrogent plus qu’elles ne répondent.
On se plaît souvent à égrener comme une litanie
sans fin tout ce que nous devons aux anciens Grecs : la philosophie,
l’histoire, le théâtre, les manifestations sportives.
Et cela n’est peut-être pas si utile, car nous devons
aussi aux Egyptiens, aux Babyloniens, aux Romains, aux Arabes. Et
à prier ce chapelet, on en oublie le véritable rôle
de la Grèce dans notre culture. Celle d’un miroir qui
a permis à l’Occident de se penser et de connaître
des révolutions intellectuelles comme la Renaissance ou les
Lumières. En ces temps sombres, la véritable question
n’est pas tant de savoir ce dont nous avons hérité
des Grecs de l’Antiquité, mais ce qu’ils nous apporteront
encore dans le futur. Et pour que cela soit possible, il faut que
la connaissance de leurs textes soit répandue et disponible.
Alors que tous ceux qui ont une connaissance du grec ancien prennent
dès aujourd’hui leur bâton de pèlerin et
se mettent à la partager.
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LE GREC ANCIEN SUR INTERNET
Le grec ancien et l'ensemble des Sciences de l'Antiquité
sont très présents sur Internet. Voici l'adresse de
plusieurs portails:
Perseus
Perseus est une bibliothèque virtuelle
pourvue d'outils d'analyse morphologie et de dictionnaires en ligne.
Diotima
Diotima offre des ressources sur les études
genre (gender studies) dans le champ des Sciences de l'Antiquité.
Bibliotheca
Selecta
Ce site offre d'importantes ressources
en français.
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QUI A SIGNE LA PETITION POUR LE GREC?
Dans la pétition en ligne en français, une signature
sur deux provient d’une personne qui n’a pas un lien direct
avec le monde académique. C’est peut-être le signe
que la société civile souhaite entrer dans le débat
du développement actuel de la science et de la connaissance.
Il est possible que, si le développement des domaines qui
trouvent une application directe, qu’il s’agisse des nanotechnologies
ou de l’analyse des processus sociaux actuels, semble à
tous souhaitable, voire nécessaire, il se trouve une part
non négligeable de la société qui considère
que l’on doive conserver au sein des hautes écoles,
des branches qui permettent une réflexion en profondeur sur
l’humanité.
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